Lorsque je parle du travail d’Estelle, je dis souvent que c’est une sorcière. Pourtant, elle n’a pas de verrue sur le nez et un chapeau pointu, ma belle-mère n’apparaît pas subitement au beau milieu de la cuisine sans que je m’y attende. Non, les raisons sont tout autres. Et il est question de santé. De ma santé.
Il y a quelques jours, nous nous apprêtions à dormir dans les bois après la visite du stupa. Subitement, j’ai senti un picotement au niveau des yeux, du nez. Puis ma respiration a commencé à être difficile. Les poumons sifflent. Je connais ces signes, je fais une crise d’asthme allergique. J’en ai fait beaucoup durant de nombreuses années. Mais ce coup-ci, c’est carabiné. Je n’ai jamais eu de crise d’asthme de cette ampleur, à tel point que je me pose vraiment la question de comment tout cela va finir. Nous sommes en plein milieu de nulle part, dans un pays dont je ne maîtrise pas les règles ni la langue et voilà plusieurs années que je n’ai plus besoin de médicaments pour ce genre de cas.
Flash back
Si je n’ai plus besoin de médicaments, c’est qu’Estelle m’a accompagné dans la prise en main de ma santé. Ça s’est produit au moment du premier confinement. Mes mains et poignets étaient alors couverts de psoriasis et chaque année, je prenais de la cortisone et tout l’attirail des asthmatiques : ventoline, antihistaminiques, collyre…
Les médecins m’expliquaient que j’allais me coltiner ça toute ma vie et que l’on n’avait pas d’autre solution.
Estelle sortait alors d’une formation en soin énergétique après s’être formée en aromathérapie. Et pourquoi pas essayer sur moi ?
Elle a mis le paquet : traitement de fond avec les huiles essentielles, soins énergétiques, régime alimentaire drastique et pour commencer une bonne détox. Pour moi, ça ne signifiait pas grand chose, je n’était pas spécialement familier avec tout ça et pas totalement convaincu, mais pas réfractaire non plus. Et pourquoi pas ?
Au lit
La détox, c’est simple, je suis resté couché trois jours. Comme si toutes les toxines de mon corps voulaient sortir à tout prix. Je ressemblais à Palpatine mais avec un gros mal de crâne. Le régime a duré plusieurs mois et les autres soins aussi. Je suis passé par des hauts et des bas, le psoriasis partait tranquillement puis est revenu d’un coup encore plus fort avant de disparaître complètement.
Depuis, plus de psoriasis, plus d’asthme et presque plus d’allergies aux pollens. Lorsque je sens des troubles liés aux allergies, Estelle me concocte un stick aux huiles essentielles à respirer, me fait deux trois formules magiques et ça passe.
Depuis, je ne remets plus jamais en doute ce que dit ma femme et quand elle veut faire une nouvelle formation, je lui dit que c’est une très bonne idée. Et surtout, je m’interroge sur notre vision de la médecine. Pourquoi cette chasse aux sorcières ? Pourquoi toutes les médecines douces sont-elles taxées de dérives sectaires ? Pourquoi cet acharnement sur l’homéopathie ou sur le soin énergétique ? Ça me semble disproportionné et m’interroge toujours.
En écrivant cet article, je sais que je vais susciter de vives réactions parmi de nombreuses personnes plus ou moins proches. Notre société est devenue allergique à ces médecines sans médecins. Mais pourquoi la médecine et la science ne s’emparent de ces sujets que pour les dénigrer ? Quand bien même tout cela relèverait de l’effet placebo, cela mériterait qu’on s’y intéresse ! Lorsqu’un chercheur plus ou moins reconnu a le malheur de parler de ce genre de sujet, il est moqué et exclu du cercle des sachants. Lorsqu’un thérapeute se dévoile, il est taxé de charlatanisme. Une vraie chasse aux sorcières vous dis-je.
Papa, tu vas mourir ?
Bref sous la tente, ce soir, ça ne va pas fort du tout. Et je n’ai pas mes anciens médicaments pour m’aider. Les ordonnances sont obsolètes et les médocs périmés depuis longtemps. Les enfants sont inquiets. Estelle me prépare un stick d’huiles essentielles et prend ses outils énergétiques.
Mais qu’est-ce donc que le soin énergétique ? Je vais en dire ce que j’en comprends. Lorsqu’Estelle va lire cet article, elle va peut-être hurler et me dire que je n’ai rien compris, je suis plutôt illettré en la matière. J’espère qu’il ne lui prendra pas l’envie de parler d’accessibilité numérique ou de l’empreinte environnementale du numérique qui sont mes domaines de compétence…
Le soin énergétique, selon moi, c’est utiliser notre corps et notre esprit pour capter “l’énergie” qui régit le vivant et poser des intentions pour l’utiliser à bon escient. En fait ce n’est pas de l’énergie comme on le conçoit en physique et qui permet grosso modo de mesurer un changement d’état. C’est plutôt ce que l’on appelle le Qi ou le Chi ou le Reiki ou pourquoi pas l’Esprit Saint ou que sais-je encore, franchement, je ne sais pas. Le truc c’est que comme la science occidentale ne veut pas s’en préoccuper, on n’a pas de nom, par conséquent, on peut l’appeler Jean-Pierre ou Chaise, à chacun de choisir ce qui lui parle.
Estelle, si je comprends bien, suit des protocoles pour passer en revue ce qui peut être déréglé et remis d’aplomb. Mais elle reçoit aussi des informations sur ce qui se passe pour moi. Grâce à ses connaissances, elle peut alors choisir d’agir sur un sujet ou l’autre. Et elle fait ça dans son coin. Elle peut même le faire à distance. Et même sans connaître la personne. Ça paraît complètement dingue.
Beau dodo
Toujours est-il qu’en quelques minutes, ma crise s’apaise. Je suis dans le mal, mais je respire à nouveau correctement. Qu’a fait Estelle ? Elle a commencé par se centrer. Se mettre dans un état de neutralité, une sorte de méditation. Ne pas écouter son cerveau, ouvrir son cœur, se mettre à l’écoute. Puis elle a utilisé ses outils de sorcière. Des cartes, des pendules, une antenne, bref plein de trucs qui me faisaient bien rigoler il y a quelques années. Eh bien je ne rigole plus du tout maintenant !
Je m’endors. Apaisé et épuisé. Encore un poil inquiet tout de même. Estelle aussi s’endort.
Je me réveille quelques temps plus tard, j’ai un mal de crâne terrible et je me sens mal. Elle se réveille également, reprend ses trucs bizarres et fait également passer ça. Je me rendors. Et le lendemain, je suis prêt à pédaler. Plus signe d’asthme. Wow ! Moi, ça m’épate.
En sortant des bois, je pose un regard très suspect sur l’ambroisie qui peuple les rebords de route. L’ambroisie est une plante très intéressante. J’en parlerai sans doute dans un prochain article. Je la vois surtout depuis la Slovénie, mais là, je m’interroge : pourquoi maintenant ?
Manger
Oui, pourquoi mon asthme revient-il d’un coup sans crier gare ? Estelle m’explique que mon corps est en état inflammatoire à cause de ce que nous mangeons. Voilà plusieurs jours qu’elle le sent, nous avons “mal” mangé ces derniers temps et nous devons retrouver une alimentation plus saine. Faute de quoi, nos corps ne peuvent plus gérer correctement les attaques liées à l’environnement et nos fragilités ressortent.
Que veut dire manger correctement ? Eh bien ça dépend des gens. Pour moi, je sais qu’il faut que j’arrête de manger du gluten, des produits laitiers, du sucre. Que je mange moins de féculents, beaucoup plus de légumes et du gras genre huile de coco ou gras animal. Il faut également que j’évite l’alcool. Il faut que je mange au maximum des produits non-transformés, sans pesticides ni cochonneries industrielles type Exxx. Et qu’il faut que je fasse ça pendant un bon bout de temps sans faire d’écart.
Or, ces derniers temps, nous avons mangé plein de trucs industriels, au gluten, avec des produits laitiers, en buvant une bière. Ou bien, manger dans des restaurants qui ne se servaient pas des produits frais pour cuisiner. Lorsque mon corps est face à ce genre de produits de temps en temps, ça ne pose pas problème. Mais l’accumulation de ces derniers temps finit par en poser. Nous devons redresser la bare. Et c’est vrai pour tous les membres de la famille.
Notre alimentation s’est dégradée petit à petit. La difficulté à trouver des aliments sains. La complexité de cuisiner durant le voyage. Petit à petit, nous avons accepté un écart, qui est petit à petit devenu une habitude, qui en a entraîné une autre, etc.
Médocs
N’empêche que je suis allé en pharmacie acheter des antihistaminiques. Si jamais je me retrouve dans la même situation et qu’Estelle n’est pas là, je veux pouvoir m’en sortir ! Je dois avoir une ordonnance pour la ventoline. Ce n’est pas encore résolu.
En attendant, je guette le nez d’Estelle pour voir si une verrue y pousse ou si elle arrive à le faire bouger de droite et de gauche pour faire apparaître le repas sur la table.