L’étape qui s’annonce n’est clairement pas sexy.
Certes, nous nous dirigeons vers la côte bleue, mais il nous faut d’abord traverser l’énorme zone très industrielle qui s’étale sur la rive gauche du Rhône. Il pleut. Fort.
Le camping où nous avons pu trouver un peu de sec et de chaud est à quelques centaines de mètres du bac qui nous permet de traverser le bras du Rhône. Gratuit pour les piétons et les cyclistes. Ça c’est bien, ça fait plaisir ! Le plaisir est de courte durée car l’équipe du bac connaît son travail. Lucie est déçue, elle pensait que nous allions prendre le bateau bien plus longtemps.
De l’autre côté, direction Port-Saint-Louis pour tenter de trouver un endroit abrité pour manger ce midi. Nous empruntons la fin de la Via Rhona et trouvons abris dans un parc sous une de ces petites maisons où les enfants aiment bien nous inviter à manger lorsque nous jouons sur ces aires de jeux que nous croisons dans presque tous les villages de France.
Léon est déjà fatigué, quelque chose ne tourne pas rond.
Port autonome
Nous quittons Port Saint Louis par une route large, tout ici est grand. Les grues au loin pour charger et décharger les containers d’immenses navires, les hangars logistiques, les cheminées, les rond-points capables d’accueillir les convois exceptionnels. Exceptionnels, ils le seront aujourd’hui car c’est le 1er mai. La route est donc peu empruntée. C’est déjà ça.
Ces blessures en bitume et béton sont les cicatrices de notre mode de vie. Les vélos que nous enfourchons, les vêtements que nous portons, le matériel informatique qui nous accompagne, tout cela est extrait du sol, modifié, fabriqué et passe par ces endroits délaissés par l’esthétique. Cet endroit me fait mal au confort.
Tractage de fortune
Léon est épuisé. Il n’y arrive pas aujourd’hui. Il faut attendre pas mal pour trouver un endroit propice pour s’arrêter et mettre en place un système me permettant de le tracter. Nous faisons désormais preuve d’un mimétisme digne du caméléon en nous déguisant justement en convoi exceptionnel ! Le papa sur son vélo tracte le vélo de Lucie en follow-me auquel est accroché le vélo de Léon par une sangle. La maman fait la voiture balais, il ne manque que les gyrophares.
La pluie semble vouloir se calmer. Ouf.
Certaines voitures font attention et ralentissent en nous doublant. Merci.
Rubans d’asphalte et de fer
Cernés entre routes et chemins de fer, utilisant les larges bas-côtés comme des pistes cyclables, nous avançons vaillamment. Les enfants discutent âprement sur la différence entre bitume et goudron.
Au détour d’une bretelle, nous voyons un lapin détaler. Puis deux, trois, plein de lapins. Nous bordons une garenne buissonneuse où les lapins sont dérangés par notre lent passage, habitués qu’ils sont à ignorer les voitures.
Mais ils ne sont pas seuls, nous voyons se carapater deux œdicnèmes criards. Ces oiseaux sont plutôt difficiles à observer, ils sortent en général à la tombée de la nuit et vivent au sol.
En passant devant la raffinerie de pétrole, je ne peux résister à l’envie de faire la photo de la banderole verte qui vante les efforts réalisés pour baisser les émissions de gaz à effet de serre de l’usine. Louable intention. La vigile interceptant mon geste me laisse conserver ma photo lorsque je lui montre.
Où dormir
Les enfants se seraient bien arrêtés plus tôt, mais où ? Arrivés à Fos sur Mer nous cherchons un petit endroit où poser la tente. Nous tombons sur un parc arborés et parsemé de crottes de chiens. Un riverain nous indique le bord de l’étang de l’Estomac comme endroit plus tranquille. C’est donc là que nous nous installerons pour la nuit. Il n’est pas loin de 16h.
Dès que la tente est dressée dans un coin tranquille, Léon s’y réfugie pour se reposer. Il s’endort pour une petite heure.
Clairement, ce n’est pas habituel. Les seuls moments où ça arrive, c’est quand il est malade.
Petite douceur du soir
Nous avons tous envie d’un moment de réconfort en famille après cette difficile étape. Les enfants veulent regarder un dessin animé et choisissent Wall-E, dessin animé dont nous avons parlé aujourd’hui. C’est l’histoire d’un robot doué de sensibilité dont la tâche est de nettoyer la planète bleue de tous les déchets que les humains y ont laissés. Ces derniers ont quitté la Terre dans un immense vaisseau-croisière en attendant pour y revenir que les robots aient fait le travail de nettoyage et que la vie y soit revenue…
C’est un dessin animé que nous aimons bien et que Lucie n’avait pas encore vu.
Belle mise en abîme dans cette journée.