La route se poursuivra… sous la pluie. Le temps du repas de midi est proche et nous commençons a chercher un lieu où se mettre à l’abri. On nous indique un prieuré un peu plus loin qui saura sans nul doute nous trouver un petit coin. Arrivés au Prieuré de Notre Dame des Champs nous sonnons l’imposante cloche pendant que Léon s’extasie devant la beauté du jardin et des statues. J’ai l’impression qu’après les étapes de routes, voitures, ville et bruits, le calme dégagé par le lieu lui procure un sentiment d’apaisement et de beauté démultiplié. On mettra à notre disposition une petite salle où nous prenons soin de ne pas pénétrer avec nos affaires mouillées.
Pour Lucie le départ est difficile. Il faut remettre les affaires humides et glisser de nouveau nos pieds dans les chaussures/piscines. Ses sens sont saturés, tout cela est violent pour elle. Mais nous devons repartir… Quelques minutes après, elle trouvera le chemin pour sortir de cette difficulté et nous profiterons alors de l’entendre chanter une bonne partie du chemin.
Les routes serpentent entre les cannes provençales et les prés à chevaux ou à taureaux magnifiques. C’est certain nous sommes en Camargue ! Marc est fatigué, il commence à se demander où nous allons dormir mais Léon motive les troupes pour que nous puissions être aux Saintes cette nuit. Alors, sous la pluie toujours, nous pédalons.
A partir de Méjane, nous rejoignons une piste qui va nous mener entre mer, terre et marais vers Les Saintes Maries de la Mer. Nous démarrons dès le début en slalomant entre les nombreux nids de poules présents. Disons plutôt que la piste est un nid de poule. Je suis surprise de rire autant à chaque nid de poule que je ne peux éviter et qui me secoue totalement, moi qui ne suis pas très à l’aise dans ce genre de situation.
Je pensais qu’au rythme auquel on pédalait il nous restait une bonne heure de route mais c’était sans compter sur une vitesse fortement ralentie par la piste en mauvaise état et la pluie qui ne cesse de tomber.
Nos pieds baignent dans nos chaussures mais nos chaussettes en laine nous permettent de ne pas trouver cela trop désagréable. Elles procurent une petite chaleur qui nous évite d’avoir en plus les pieds tout froids.
La piste est longue. Léon commence a trouver cela difficile mais nous roulons tous les deux et nous nous soutenons. On en profite pour faire des pauses, admiratifs devant les flamands roses et la mer. Heureux tout de même d’être arrivés au bord. De toute façon, Marc ayant envie de s’arrêter plus tôt, nous regardions depuis plusieurs kms mais ne trouvions aucun endroit propice pour poser la tente. Cela fait maintenant une quarantaine de Kms que nous roulons et il nous reste encore 10 kms à faire et trouver ensuite un lieu où dormir.
Nous devons rester très attentifs à la piste car le slalom avec le poids des vélos n’est pas aisé. Puis, d’un seul coup je vois ce nid de poule en face que je ne pourrai éviter. Si je tourne plus sec pour le passer le chargement me fera basculer… Je sens pourtant qu’il ne me laissera pas passer… et je ne me trompe pas ! Il est tellement profond que mon vélo ne réussit pas à avoir suffisamment d’élan pour passer la première roue en entier, je suis tirée de nouveau vers l’arrière et tout bascule. J’ai juste le temps de sauter pour ne pas me retrouver pleine de boue dessous et retenir le maximum en espérant réussir à remonter tout et à sortir de ce trou. Je tire environ 80 kg mais finalement c’est sans souci. Et étonnamment toujours en riant comme un enfant ! Décidément cette piste me fait voir les choses sous un autre œil… Ou bien, sachant que nous n’avons d’autre choix que d’avancer un autre mécanisme s’est mis en marche pour être certaine que personne ne craque avant l’arrivée ? Léon me fait rire car il trouve que j’ai fait exactement comme un cascadeur chinois en sautant par dessus mon vélo.
Enfin, ça y est, nous voyons le bout de la piste ! Un peu de route pour rejoindre les Saintes qui se dessinent au loin. Il est tard. Nous sommes épuisés par les conditions. Nous devons encore trouver où dormir…